9:891 891 DISCOURS D'ADIEU AUX MINISTRES. Du vendredy 28e iour d'apvril 1564, recueilli par (Pinaut) l) et escript au naif autant qu'il se Vest peu remettre en memoire, et de mot a mot selon qu'il avoit este prononce, quoyque par quelqu'autre ordre en quelques mots et propos. Mes freres, d'autant que i'ay eu a, vous dire quelque chose qui concerne l'estat, non seulement de ceste Eglise mais aussi de plusieurs aultres qui quasi en dependent, il sera bon de commencer par la priere, afin que Dieu me face la grace de dire le tout sans ambition, mais tousiours regardant a sa gloire, et aussi que un chacun puisse retenir et faire son profit de ce qui sera dict. Il pourroit sembler que ie m'advance beaucoup et que ie ne suis pas si mal que ie me fais accroire : mais ie vous asseure que combien que ie me suis trouve autrefois fort mal, toutesfois ie ne me trouvay iamais en telle sorte ne si debile comme ie suis. Quant on me prend pour me mettre seulement sur le lict, la teste s'en va et m'esvanouis incontinent. Il y a aussi ceste courte haleine qui me presse de plus en plus. Ie suis en tout contraire aux autres malades: car quand ils s'approchent de la mort, leurs sens s'esvanouissent et s'esgarent. De moy, vray est que ie suis bien hebete, mais il semble que Dieu veuille retirer tous mes esprits dedans moy et les renfermer, et pense bien que i'auray bien de la peine et qu'il me coustera bien a mourir, et ie pourray perdre le parler que i'auray encores bon sens: mais aussi en ay-ie adverty et ay dict ce que ie voulois qu'on me fist, et par ainsy i'ay bien voulu parler a vous devant que Dieu me retire, non pas que Dieu ne puisse bien faire autrement que ie ne pense: ce seroit temerite a moy de vouloir entrer en son conseil. Quand ie vins premierement en ceste Eglise il n'y avoit quasi comme rien. On preschoit et 1) Nous ne savons pourquoi ce nom est en parenthese.