51:92 faire tous vituperes sans qu'il s'en appercoive. Si ceste sentence estoit bien observee, nous cheminerions en autre reverence que nous ne faisons pas: mais nous voyons comme les hommes se profanent, voire a leur escient, et s'endurcissent tellement qu'il n'y a ne honte ne honnestete quand il est question de parler de bien et de mal, que la on verra qu'a pleine bouche ils corrompent et pervertissent toute droiture, et blasphement a l'encontre de Dieu, Et dont procede cela? Il est vray que plusieurs sont hypocrites et se flattent: mais le diable ena possede d'aucuns tellement qu'ils crachent contre le ciel manifestement, c'est a dire qu'ils despitent Dieu sans ancun scrupule: et en cela void-on qu'ils sont du tout mis en sens reprouve et en esprit de forcenerie. Et dont procede une telle audace de s'eslever contre Dieu? C'est (comme nous avons declare) de ceste hypocrisie, quand nous cuidons deguiser tellement par nos subtilitez et par nos belles repliques les choses qu'il n'y a plus de discretion entre le blanc et le noir. D'autant plus donc nous faut-il bien retenir ceste admonition de sainct Paul. Or la dessus il continue le propos qu'il a touche, mesmes il l'estend plus au large, en disant que selon que nous aurons seme nous recueillir ons, et celuy qui aura seme en l'Esprit, il recueillir a a vie eternelle de V Esprit : celuy qui aura seme en la chair, il recueillira corruption. Ici en somme sainct Paul accompare toutes les estudes et les soings que nous avons, et toutes les peines que nous prenons, aux semailles qu'ont les laboureurs. Car pourquoy estce que les hommes s'employent a ceci ou a cela, qu'ils y travaillent, qu'ils s'y efforcent, sinon d'autant qu'ils se proposent quelque fin? D'antant (di-ie) qu'ils esperent fruict pour leur commodite: voila pourquoy ils ne se lassent point en travaillant. Exemple, Celuy qui taschera de gagner beaucoup, il souffrira et faim et soif, et froid et chaud, rien ne luy couste. Et pourquoy? Car l'avarice le transporte tellement qu'il oublie tout et se tormente plus que s'il estoit entre les mains de ses ennemis, il ne seroit point tormente d'avantage. Or donc quand un homme met grand peine a amasser des biens, c'est comme si un laboureur semoit: or il pretend de recueillir en la fin, et de venir a moisson. Celuy qui se voudra faire valoir selon le monde n'osera pas dormir la moitie de son saoul: et en sa vigilence que cerche-il? De parvenir a quelque honneur et dignite, et d'avoir credit. Et bien, l'ambition est comme la moisson de ceux qui appetent les honneurs du monde. Us veulent recueillir. Et quoy? Ce que leur nature desire et porte. Autant en est-il de tout le reste. Comme un gourmand travaillera pour avoir a satisfaire a son appetit, il taschera plustost de faire quelques 92