23:765 765 SERMONS. 766 quand il est question de la vertu incomprehensible de Dieu. Et ainsi nous devrions desia estre tout faconnez a recognoistre sa providence, et l'adorer quand il nous declaire qu'il veut surmonter tous nos sens. Mais quoy? C'est pitie que nous ne pouvons eslever Dieu, pour dire qu'il puisse plus que nos sens nous promettent du premier coup. Et voila aussi pourquoy il y a tant peu de foy au monde. Et mesmes ceux qui ont quelque bonne affection, et qui semblent estre disposez pour croire a Dieu, neantmoins ils ont leur foy tant maigre et tant debile, qu'il ne faut rien pour l'abattre. Or tout le mal vient de ce que nous n'avons pas ceste persuasion enracinee en nous touchant la Providence de Dieu. Quand sainct Paul parle d'Abraham (ainsi que nous avons traitte) il dit qu'il a donne gloire a Dieu, estimant qu'il estoit puissant. Et c'est une partie de ce [pag. 267] qu'il dit, qu'il nous faut remettre a la Providence de Dieu toutes les choses qui nous pourroyent tormenter, et desquelles nous ne pourrions avoir nulle resolution. D'autant plus donc nous faut-il bien mediter ceste doctrine. Et ainsi toutes fois et quantes qu'il nous viendra des fantasies en la teste pour nous retenir et pour nous refroidir, que nous ne facions ce que Dieu nous a commande, que tousiours nous ayons ce mot pour faire bouclier : Dieu y pourvoira, comme quoy? Il semble souvent que ce que Dieu nous commande soit pour nous apporter beaucoup d'inconveniens. Et voila ceste maudite sagesse des hommes qui est la plus grande ennemie de la foy, qui tousiours veut avoir la vogue. Car voila Dieu qui commandera a un roy, et a un prince, et a tous magistrats de faire qu'il soit honnore, et que son service soit maintenu purement. Or la dessus on regarde que le monde est si revesche qu'a grand peine en peuton iouir: on regardera, Comment? il y aura tant de murmures contre nous : et puis il faudra si on tient telle rigueur, que tout rompe. Car on void comme les hommes ne se laissent pas aisement manier. Il y viendra donc des troubles. Et puis quand on void ainsi les dificultez, il se faut moderer en quelque sorte: autrement on void bien qu'on n'en [pag. 268] pourroit venir a bout. Voila, di-ie, les tentations qu'auront ceux qui devroyent s'opposer au mal. Or qu'avient-il? Communement ceux qui semblent estre les mieux advisez et prudens iusques au bout, voudront parler et moyenner en telle sorte qu'il n'y ait ni chair ni poisson, comme on dit. Et la dessus voila Dieu qui sera recule. Premierement il y a ce mal, qu'on ne luy obeit pas rondement comme on doit: et puis on le despouille de l'honneur qui luy appartient. Car si on allegue: O il y pourra advenir telle chose. Et Dieu est-il mort? N'a-il pas preveu a tous les inconveniens qui pourroyent advenir? Et si on dit,