9:756 et quelle est la facon de le bien et deuement servir. Il y a puis apres les dependances: a scavoir, quel est le vray estat de l'Eglise, l'office des Prelats et Pasteurs, la nature, vertu et usage des Sacremens. Pour bien cognoistre en quoy consiste le vray salut des hommes, il faut scavoir quel est leur estat et condition. Or nous tenons ce que l'Escriture enseigne, que tout le genre humain a tellement este corrompu par la cheute d'Adam, que de nature nous sommes tous damnez et perdus, non pas seulement par la coulpe d'autruy: mais pource que des le ventre de la mere nous sommes pecheurs, et que Dieu [page 9] nous peut iustement condamner, encores qu'il n'y ait point d'acte apparent par lequel nous ayons deservy condamnation. D'avantage nous tenons que le peche originel est une corruption espandue par nos sens et affections, en sorte que la droite intelligence et raison est pervertie en nous, et sommes comme povres aveugles en tenebres, et la volonte est subiette a toutes mauvaises cupiditez, pleine de rebellion et adonnee a mal. Bref, que nous sommes povres captifs detenus sous la tyrannie de peche : non pas qu'en mal faisant nous ne soyons poussez par nostre volonte propre, tellement que nous ne scaurions reietter ailleurs la faute de tous nos vices, *) mais pource qu'estans issus de la race maudite d'Adam, nous n'avons pas une seule goutte de vertu a bien faire, et toutes nos facultez sont vicieuses. De la nous concluons que la source et origine de nostre salut est la pure misericorde de Dieu: car il ne se trouvera en nous aucune dignite dont il soit induit a nous aimer. Nous aussi estans mauvais arbres ne pouvons porter aucun bon fruict, et par ce moyen ne pouvons prevenir Dieu pour nous acquerir ou meriter grace envers luy: mais il nous regarde en pitie pour nous faire mercy, et n'a autre occasion d'exercer sa misericorde en nous, que nos miseres. Mesmes nous tenons que ceste bonte laquelle il desploye envers nous, procede de ce [page 10] qu'il nous a esleuz devant la creation du monde ne cherchant point la cause de ce faire hors soy-mesme et son bon plaisir. Et voyla nostre premier fondement, que nous sommes agreables a Dieu d'autant qu'il luy a pleu nous adopter pour ses enfans devant que nous fussions nays, et par ce moyen il nous a retirez par privilege singulier de la malediction generale en laquelle tous hommes sont plongez. Mais pource que le conseil de Dieu est incomprehensible, nous confessons que pour obtenir salut il nous faut venir au moyen que Dieu a ordonne: car nous ne sommes point du nombre des fantastiques, qui sous ombre de la predestination 1) la faute de nos pechez.