23:693 693 SERMONS. 694 faut donc venir au iuge celeste, comme il en est parle. Et voila pourquoy notamment Moyse exprime que Dieu a repute a iustice ce qu9Abram a creu. Et si tout le monde eust ainsi estime et approuve la foy d' Abram, et quil Peust canonize par maniere de dire, comme si c'eust este un Ange, tout cela neantmoins n'eust este que fumee, mais Dieu prononce ce qui en est, luy qui est iuge competant et auquel il appartient de [pag. 118] donner sentence ou d'absolution ou de condemnation. Quand donc Dieu absout ainsi Abram, et qu'il le recognoit et tient pour iuste, voila le principal. Ainsi donc nous voyons maintenant comme Abram a este iustifie par la foy. Sainct Paul dit que de la il s'ensuit, qu'il n'a peu meriter iustice par ses oeuvres et qu'il n'a rien apporte de son propre pour estre approuve de Dieu, mais qu'il l'a receu gratuitement le faisant estre du nombre de ses enfans. Et de fait sainct Paul prend ce chemin ici quand il veut disputer de la iustification gratuite c'est qu'il veut monstrer qu'il n'y a autre esperance de salut qu'en la pure bonte de Dieu, d'autant qu'il nous pardonne nos pechez, a fin que nous luy soyons agreables. Quand donc sainct Paul entre en cest argument-la, il prend ce theme d'Abram: car il presuppose ce qui est vray, qu'il n'y a point divers moyens pour estre iustifiez devant Dieu, il n'y a qu'une seule reigle. Si donc Abram a este iustifie par la foy, il faut que nous le soyons tous sans exception. D'avantage s'il se pouvoit trouver en un homme mortel vertu qui meritast, il est certain qu'Abram a surmonte tous les autres. Nous avons desia veu comme il a quitte le pays de sa naissance, comme il a renonce a soymesmes et a toutes affections humaines, comme il a obei [pag. 119] a Dieu en tout et par tout. Nous avons veu comme il a este patient, et comme il est demeure ferme et constant au milieu des tentations et comme il a persiste iusques aii bout en la vocation de Dieu, brief, rien ne luy a deffailli. Or nous sommes bien loing d'une telle perfection. Qui sera donc celuy qui s'osera vanter de pouvoir obtenir iustice devant Dieu par ses merites, veu que Abram en a este forclos? Mais il nous doit suffire de ce que i'ay touche, c'est assavoir qu'il n'y a qu'une seule reigle pour nous rendre agreables a Dieu: c'est celle qui nous est ici monstree en la personne d'Abram. Il faut donc que ceste conclusion soit adioustee, que si Abram en croyant a Dieu a este iustifie que nos oeuvres ne peuvent rien pour nous faire approuver de Dieu, et pour fonder l'esperance que nous devons avoir du salut eternel, qu'il faut que Dieu nous donne le tout et que nous ne presumions point de luy rien apporter de nostre coste. Cela sera deduict plus au long: mais il nous faut tenir une procedure la