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53
LIVRE
I.
CHAPITRE
IV.
54
tous
le
veulent
mesurer
selon
la
capacité
de
leur
sens
charnel,
qui
est
du
tout
stupide.
Davantage,
en
mesprisant
de
s'enquerir
a
bon
escient
pour
parvenir
a
quelque
fermeté,
ils
ne
font
que
voltiger
par
leur
curiosité
en
speculations
inutiles.
Parquoy
ils
n'apprehendent
point
Dieu
tel
qu'il
s'offre,
mais
ils
l'imaginent
tel
qu'ils
l'ont
forgé
par
leur
temerité.
Ce
gouffre
estant
ainsi
ouvert,
de
quelque
costé
qu'ils
mettent
le
pied,
il
faut
qu'ils
se
precipitent
en
ruine:
et
quoy
qu'ils
brassent
puis
apres
pour
l'honnorer
et
servir,
ne
sera
point
aloué
en
ses
contes:
pource
que
ce
n'est
pas
luy
qu'ils
honnorent,
mais
en
son
lieu
leurs
songes
et
resveries.
Ceste
perversité
est
expressement
taxée
par
S.
Paul,
quand
il
dit
que
les
hommes
appetans
d'estre
sages
ont
esté
du
tout
insensez
(Rom.
1,
22).
Il
avoit
dit
un
petit
auparavant,
qu'ils
se
sont
esvanouis
en
leur
pensées:
mais
afin
que
nul
ne
les
excusast
de
coulpe,
il
adiouste
qu'ils
ont
esté
aveuglez
à
bon
droit:
veu
que
ne
se
contentans
point
de
sobrieté
et
modestie,
ils
se
sont
usurpé
plus
qu'il
ne
leur
estoit
licite:
et
par
ce
moyen
sciemment
et
de
leur
bon
gré
ils
se
fourrent
en
tenebres:
mesme
par
leur
perversité
et
arrogance
ils
se
rendent
insensez.
Dont
il
s'ensuit
que
leur
follie
n'est
point
excusable,
laquelle
procede
non
seulement
de
vaine
curiosité,
mais
aussi
d'un
appetit
desbordé
de
plus
savoir
que
leur
mesure
ne
porte,
ioint
une
fausse
presomption
dont
ils
sont
pleins.
2.
Quant
à
ce
que
David
dit,
que
les
meschans
et
insensez
pensent
en
leur
coeur
qu'il
n'y
a
point
de
Dieu
(Ps.
14,
1
et
53,
1):
premierement
il
se
doit
appliquer
à
ceux
qui
ayans
estouffé
la
clarté
de
nature,
s'abrutissent
à
leur
escient:
comme
derechef
nous
verrons
tantost.
Et
de
fait
il
s'en
trouve
plusieurs,
lesquels
s'estans
endurcis
à
pecher
par
audace
et
coustume,
reiettent
avec
une
rage
toute
memoire
de
Dieu,
laquelle
toutesfois
leur
est
remise
au
devant
par
leur
sens
naturel,
et
ne
cesse
de
les
soliciter
au
dedans.
Or
pour
rendre
leur
fureur
tant
plus
detestable,
il
dit
que
precisement
ils
roist
une
merveilleuse
vanité
et
insipience
de
nous
tous.
Car
au
lieu
qu'en
toute
nostre
vie
debvroit
estre
entretenue
une
obeissance
perpetuelle
envers
luy,
quasi
en
toutes
noz
oeuvres:
luy
resistant
nous
le
voulions
appaiser
seulement
de
quelques
petites
satisfactions.
Au
lieu
qu'il
luy
failloit
complaire
en
saincteté
et
innocence
de
coeur,
nous
forgeons
ie
ne
sçay
quelz
fatras
et
ceremonies
de
neant,
esperant
l’amuser.
D'avantage
au
lieu
que
nostre
fiance
debvroit
estre
du
tout
fichée
en
luy,
elle
repose
en
nous
ou
aux
autres
creatures.
Finalement
nous
sommes
envelopez
de
tant
d'erreurs
et
meschantes
opinions,
que
ceste
estincelle
de
verité,
laquelle
nous
escleroit
pour
nous
conduire
à
contempler
la
maiesté
de
Dieu,
est
couverte
et
estaincte
tellement,
qu'elle
ne
nous
maine
point
iusques
à
droicte
congnoissance,
seulement
en
demeure
la
premiere
semence,
qui
ne
peut
estre
iamais
du
tout
arrachée:
c'est
à
sçavoir
de
congnoistre
qu'il
y
a
quelque
divinité.
Et
encores
icelle
semence
est
tellement
corrompue,
qu'elle
ne
produict
que
tresmauvais
fruictz.
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