21:43 43 VIE DE CALVIN suivissent un mesme train de bien en mieux. Et sur cela les ayant priez en general et en particulier luy pardonner tous ses defauts, lesquels nul n'a iamais trouvez si grans que luy, il leur tendit la main. Ie ne scay s'il eust pu advenir un plus triste spectacle a ses* Seigneurs qui le tenoyent tous, et a bon droict, quant a sa charge comme la bouche du Seigneur: et quant a l'affection comme leur propre pere, comme aussi il en avoit cognu t dresse une partie des leur ieunesse. Le Vendredi 20 *) d'Apvril tous les freres Ministres, et de la ville et des champs, ayans este advertis a sa requeste, s'assembleront en sa chambre, ausquels il fit une longue remonstrance: de laquelle la substance estoit qu'ils eussent a perseverer de bien faire leur devoir apres sa mort et qu'ils ne perdissent point courage: que Dieu maintiendroit et la ville et l'Eglise, combien qu'elles fussent menacees de plusieurs endroits, [page 54] Aussi qu'ils n'eussent point de piques entre eux, mais que charite y regnast et qu'ils fussent bien unis ensemble. Qu'ils recognussent combien ils sont obligez a ceste Eglise en laquelle Dieu les a appellez: qu'il n'y eust rien qui les en detournast: que ceux qui en seroyent desgoustez et la voudroyent laisser, pourroyent bien par dessous terre trouver des excuses, mais que Dieu ne se laisseroit point moquer. A ce propos il adiousta un recit de son entree en ceste Eglise et de sa conversation en icelle: disant que quand il y vint l'Evangile s'y preschoit, mais que les choses y estoient fort desbordees et que l'Evangile estoit a la pluspart d'avoir abbatu les idoles, qu'il y avoit beaucoup de meschantes gens, et luy avoit falu recevoir beaucoup d'indignitez, mais que Dieu l'avoit fortifie pour tousiours tenir bon, combien que de sa nature il fust craintif. Et repeta par deux ou trois fois ces mots: Ie vous asseure que de ma nature ie suis timide et craintif. Aussi il rememora que quand il revint de Strasbourg ici il suyvit ceste vocation comme estant contraint, et ne voyant pas qu'il en deust venir grand fruict, aussi ne scachant ce que Dieu vouloit faire. Et de faict qu'il y avoit eu beaucoup [page 55] de difficultez: mais qu'avec le temps en continuant il avoit veu la benediction de Dieu sur son labeur. Que donc chacun se fortifiast en sa vocation et a tenir bon ordre, qu'on prinst garde au peuple pour le tenir tousiours en l'obeissance de la doctrine: qu'il y avoit de gens de bien, mais que ce n'estoit pas qu'il n'y en eust aussi de malins et rebelles. Que ce seroit pour nous rendre bien coulpables devant Dieu si les choses estans avancees iusques ici venoyent apres en desordre par nostre negligence. Au reste l)sic!