21:40 40 tant s'en faloit qu'il se pleust en ce defaut que au contraire nul ne l'a mieux aperceu ne l'a trouve si grand que luy. Cela soit dit quant a sa vie et conversation domestique, en laquelle ce seul defaut que iamais i'aye cognu en luy estoit tempere de si grandes et tant aimables vertus, et si peu ou point du tout accompagne des autres vices qui ont accoustume de le suyvre, que nul ami n'en demeura onques offense ni de faict ni de paroles. Mais quant au public concernant la charge que Dieu luy avoit commise, c'est la ou il faut que i'admire la grande sagesse de Dieu tournant toutes choses a sa gloire, sur tout en ses organes et instrumens plus singuliers. Ceux qui ont veu et cognu a quelles gens il a eu affaire le plus souvent, les choses que Dieu a declarees et faites par luy, les circonstances des temps et des lieux, ceux-la peuvent iuger de quoy une telle vehemence, vehemence, di-ie, vrayement prophetique, a servi et servira a toute la posterite. Et ce qui [page 42] le rendoit plus admirable estoit que, n'ayant et ne cerchant rien moins que ce qui est tant requis par ceux qui se veulent faire craindre par une apparence exterieure, il faloit que les plus obstinez et pervers fiechissent sous la grande vertu de Dieu environnant son fidele et irreprehensible serviteur. Ceux qui liront ses escrits et cercheront droitement la gloire de Dieu y verront reluire ceste maieste dont ie parle. Quant a ceux qui traittent auiourd'huy la religion comme les affaires politiques, plus froids que glace aux affaires de Dieu, plus enflambez que feu en ce qui concerne leur particulier, et qui appellent colere tout ce qui est dit plus franchement qu'il ne leur plaist: comme il n'a iamais tasche de plaire a telles gens, aussi feroye-ie conscience de m'amuser a leur respondre. Que diroyent donc ces sages gens et si attrempez (pourveu qu'il ne soit question que de Dieu) s'ils avoyent senti de plus pres une telle colere? Ie m'asseure qu'ils s'en fussent aussi mescontentez, comme ie m'estime et estimeray heureux tout le temps de ma vie d'avoir iouy d'une si grande et si rare vertu, en public et en particulier. Ie ne pourrois iamais estre las de me consoler en l'absence d'un tel et si excellent personnage en le me representant par le discours de [page 43] ses vertus tant rares et exquises. Mais si ne puis-ie sans merveilleux regret parachever ce qui reste, et qui ne peut toutesfois nullement estre laisse, attendu que c'est comme la couronne et l'ornement de toute sa vie. Outre *) ce que Dieu avoit loge ce grand esprit en un corps imbecille et dispose de soy-mesmes au mal de pthisie, duquel aussi il est mort, les estudes de sa 1) Ici commence V extr ait de Garnier, mis en tete de l'edition latine du Commentaire sur Josue.