21:36 36 chose si ridicule et si faussement controuvee que tout homme qui l'a iamais tant soit peu cognu ne demandera iamais defense contre une telle mensonge. Il a este si fort avaricieux qu'ayant en somme toute six cens florins de gage, qui ne reviennent iusques a trois cens livres tournois, il a mesmes pourchasse d'en avoir moins, et les contes de ceste Seigneurie en feront foy. Il a este si convoiteux des biens de ce monde qu'estant prise, voire mesmes honore et de rois et de princes et de seigneurs de plusieurs nations, et mesmes leur ayant dedie ses ouvrages, ie ne scache (et le scaurais a mon advis [page 33] s'il estoit autrement) que iamais il en ait receu a son profit la valeur de vingt escus. Aussi avoit-il la sacree parole de Dieu en telle reverence qu'il eust mieux aime mourir que de s'en servir d'apast en ambition ou avarice, ll a dedie ses livres ou a quelques personnes privees en recognoissance de quelque bienfaict ou d'amitie, comme un docte et singulierement beau Commentaire sur le livre de Senecque touchant la vertu de clemence, lequel il fit a Paris a l'aage de 24 ans, et le dedia a l'un des seigneurs de Mommor, avec lesquels il avoit eu ce bien d'estre nourri, non pas toutesfois a leurs despens. Le semblable est de ses Commentaires sur l'epistre aux Romains dediee a Simon Grinee: sur la premiere aux Corinthiens, au Seigneur Marquis Caraciol: sur la seconde, a Melchior Volmar son precepteur en Grec : sur la premiere aux Thessaloniciens, a Mathurin Cordier son regent au college de Saincte Barbe a Paris en sa premiere ieunesse : sur la seconde, a Benoist Textor son medecin : sur l'Epistre a Tite, a ses deux singuliers amis et compagnons en l'oeuvre du Seigneur, M. Guillaume Farel et M. Pierre Viret: et le livre des Scandales a, Laurent de Normandie son ancien et perpetuel ami. Quant aux autres dediez a quelques rois ou princes ou republiques [page 34], son but estoit d'encourager les uns par ce moyen a perseverer en la protection des enfans de Dieu et y inciter les autres. Parquoy aussi quand il a veu que tels personnages faisoyent tout le contraire, il n'a pas fait difficulte d'oster leurs noms pour y en mettre d'autres: ce qui est toutesfois seulement advenu en deux prefaces. Voila quant a ce crime d'avarice. Autres tout au contraire l'ont fait prodigue et ioueur, mais aussi a propos que ceux qui l'ont charge de paillardise. Quant a la prodigalite et ce qui s'en ensuit, aumoins ses livres feront foy iusques a la fin du monde de ses passetemps et de l'impudence de tels menteurs. Quant a la paillardise ce seroit merveilles qu'homme ait ose se desborder iusques a forger ceste calomnie, n'estoit que c'est une chose toute accoustumee contre les plus excellens serviteurs de Dieu. Mais il est a naistre qui iamais en ait mesmes soupsonne celuy dont nous parlons en