51:278 qu'il n'y a autre cause pour discerner les uns d'avec les autres: et que ceux qu'il a reprouvez perissent pource qu'ils en sont dignes : et ceux qu'il appelle a salut ne doyvent cercher la cause ailleurs sinon en ceste adoption gratuite. Et au reste, par ces deux mots S. Paul nous a aussi voulu inciter a une plus grande affection, et plus ardente de louer Dieu. Car ce n'est point assez que nous confessions froidement que nostre salut procede de sa pure liberalite: mais il faut que nous soyons comme enflammez pour nous adonner du tout a sa louange, comme si nous estions pleinement dediez a cela: ainsi que S. Pierre aussi le remonstre, puis que nous sommes retirez des tenebres de mort, c'est bien raison que nous racontions les louanges inenarrables de Dieu. Et par cela il nous advertit que quand les fideles auront fait tous leurs efforts de s'acquitter envers Dieu, louant sa bonte, qu'encores ils n'en viendront iamais a bout, car c'est une chose incomprehensible. Voila donc ce que nous avons a retenir. Et ainsi de ceste bonte dont il parle, ou de ceste grace, il nous faut retenir que iusques a ce que les hommes soyent du tout aneantis, et qu'il ne leur reste point une seule goutte en quoy ils se puissent glorifier, que iamais la gloire qui appartient a Dieu ne luy sera rendue. Prenons le cas qu'on ne fist iamais memoire de l'election de Dieu: laisseroitil pourtant d'estre loue? Nenni: mais ce seroit en partie. Car quand on dira seulement que Dieu fait luire son soleil sur les hommes, voila de quoy le magnifier. Quand nous ouvrons les yeux pour contempler haut et bas les oeuvres admirables qu'il nous monstre, voila ample argument pour nous exercer en sa louange tout le temps de nostre vie. Il y a encores plus, que quand son Evangile nous est presche, il y a aussi de quoy pour louer Dieu, encores qu'on ne parlast point de son election: ie di assez, pour nostre regard: mais il seroit frustre du principal de sa louange, et nous ne luy rendrions sinon en partie ce qui luy est deu. Et pourquoy? Car les fideles penseroyent avoir la foy de leur mouvement propre et de leur volonte. Nous avons dit ce matin que la foy est un fruict de l'election: car nous ne sommes discernez d'avec les incredules, sinon d'autant que Dieu nous a tendu la main et qu'il nous a attirez d'une facon secrete, du temps que nous luy tournions le dos et que nous estions faits estranges de luy. En somme, non sans cause sainct Paul dit ici que la louange de Dieu ne sera point glorifiee comme elle le merite, iusques a tant que nous ayons cognu que son election est cause de tous les biens qu'il nous eslargit: et que si nous n'estions adoptez de luy par sa misericorde infinie et selon son conseil eternel, que nous aurions une partie de la louange qui luy est deue. Or Dieu seroit diminue et amoindri d'autant. En somme 18*