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EPISTRE
AU
LECTEUR.
170
que
chant.
Et
n'est
pas
chose
inventee
depuis
peu
de
temps.
Oar
des
la
premiere
origine
de
l'Eglise
cela
a
este,
comme
il
appert
par
les
histoires.
Et
mesmes
sainct
Paul
ne
parle
pas
seulement
de
prier
de
bouche,
mais
aussi
de
chanter.
Et
a
la
verite,
nous
congnoissons
par
experience,
que
le
chant
a
grand
force
et
vigueur
d'esmouvoir
et
enflamber
le
coeur
des
hommes,
pour
invoquer
et
louer
Dieu
d'un
zele
plus
vehement
et
ardent.
Il
y
a
tousiours
a
regarder,
que
le
chant
ne
soit
pas
legier
et
volage:
mais
ait
pois
et
maieste,
comme
dit
sainct
Augustin.
Et
ainsi
il
y
ait
grande
difference
entre
la
musicque
qu'on
faict
pour
resiouyr
les
hommes
a
table
et
en
leur
maison:
et
entre
les
psalmes,
qui
se
chantent
en
l'Eglise,
en
la
presence
de
Dieu
et
de
ses
anges.'
Or
quand
on
vouldra
droictement
iuger
de
la
forme
qui
est
icy
exposee;
nous
esperons
qu'on
la
trouvera
saincte
et
pure:
veu
qu'elle
est
simplement
reiglee
a
l'edification,
dont
nous
avons
parle,l)
combien
que
Vusaige
de
la
chanterie
s'estende
plus
loing.
Cest
que
mesme
par
les
maisons
et
par
les
champs
ce
nous
soif
une
incitation
et
comme
un
organe
a
louer
Dieu,
et
eslever
noz
cueur
s
a
luy
pour
nous
consoler,
en
meditant
sa
vertu,
honte,
sagesse
et
iustice.
Ce
qui
est
plus
necessaire
qu'on
ne
scauroit
dire.
Four
le
premier,
ce
n'est
pas
sans
cause
que
le
Sainct
Esprit
nous
exhorte
si
soigneusement
par
les
sainctes
escritures,
de
nous
resiouyr
en
Dieu,
et
que
toute
nostre
ioye
soit
la
reduite,
comme
a
sa
vraye
fin.
Car
il
congnoist
combien
nous
sommes
enclins
a
nous
resiouyr
en
vanite.
Tout
ainsi
donques
que
nostre
nature
nous
tire
et
induit
a
cercher
tous
moyens
de
resiouyssance
folle
et
vicieuse:
aussi
au
contraire,
nostre
Seigneur,
pour
nous
distraire
et
retirer
des
allechemens
de
la
chair
et
du
monde,
nous
presente
tous
moyens
qu'il
est
possible,
afin
de
nous
occuper
en
ceste
ioye
spirituelle
laquelle
il
nous
recommande
tant.
Or
entre
les
autres
choses,
qui
sont
propres
pour
recreer
Vhomme
et
luy
donner
volupte,
la
Musicque
est,
ou
la
premiere,
ou
i
une
des
principalles:
et
nous
faut
estimer
que
c'est
un
don
de
Dieu
depute
a
cest
usaige.
Parquoy,
d'autant
plus
devons
nous
regarder
de
n'en
point
abuser,
de
peur
de
la
souiiler
et
contaminer,
la
convertissant
en
nostre
condamnation
ou
elle
estoit
desdiee
a
nostre
proffit
et
salut
Quand
il
n'y
auroit
autre
consideration
que
ceste
seule,
si
nous
doit
elle
bien
esmouvoir
a
moderer
l'usage
de
la
musicque,
pour
la
faire
servir
a
toute
honnestete
et
qu'elle
ne
soit
point
occasion
de
nous
lascher
la
bride
a
dissolution,
ou
de
nous
effeminer
en
delices
desordonnees,
et
qu'elle
ne
soit
point
instrument
de
la
paillardise
ne
d'aucune
impudicis
e.
Mais
encore
y
a
il
d'avantage.
Car
a
grand
peine
y
a
il
en
ce
monde
qui
puisse
plus
tourner
ou
flechir
ca
et
la
les
meurs
des
hommes,
comme
Plato
l'a
prudemment
consydere.
Et
de
fait
nous
experimentons
qu'elle
a
une
vertu
secrette
et
quasi
incredible
a
esmouvoir
les
cueurs
en
une
sorte,
ou
en
l'autre.
Parquoy
nous
devons
estre
d'autant
plus
diligens
a
la
reigler,
en
telle
sorte
qu'elle
nous
soit
utile
et
nullement
pernicieuse.
Pour
ceste
cause,
les
Docteurs
anciens
de
l'Eglise
se
complaignent
souventesfois
de
ce
que
le
peuple
de
leur
temps
estoit
addonne
a
chansons
deshonnestes
et
impudiques,
lesquelles
non
sans
cause
His
estiment
et
appellent
poison
mortelle
et
Satanique
pour
corrompre
le
monde.
Or
en
parlant
maintenant
de
la
Musicque,
ie
comprens
deux
parties,
ascavoir
la
lettre,
ou
subiect
et
matiere.
Secondement
le
chant,
ou
la
melodie.
Il
est
vray
que
toute
parolle
mauvaise
(comme
dit
sainct
Paul)
pervertit
les
bonnes
meurs,
mais
quand
la
melodie
est
avec,
cela
transperce
beaucoup
plus
fort
le
cueur
et
entre
au
dedans
tellement
que
comme
par
un
entonnoir
le
vin
est
iecte
dedans
le
vaisseau,
aussi
le
venin
et
la
corruption
est
distille
iusques
au
profond
du
cueur,
parla
melodie.
Or
qu'est-il
doncq
question
de
faire?
c'est
d'avoir
chansons
non
seulement
honnestes,
mais
aussi
sainctes:
lesquelles
nous
soyent
comme
esguillons
pour
nous
inciter
a
prier
et
louer
Dieu,
a
mediter
ses
oeuvres,
afin
de
l'aymer,
craindre,
honnorer
et
glorifier.
Or
ce
que
dit
S.
Augustin
est
vray,
que
1)
Cest
ici
que
se
termine
la
preface
dans
la
premiere
editicn.
Ce
qui
suit
ne
se
trouve
que
dans
celle
de
1545
et
dans
les
editions
du
Psautier.
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